article original publié par Science @ Nasa
auteur : Docteur Tony Phillips
traduction de Didier Jamet
21 DECEMBRE 2007
Imaginez : demain c’est Noël, et vous êtes confortablement blotti dans votre nid douillet. Un bon feu de bois crépite dans la cheminée, et votre tête se fait lourde tandis que vous commencez à vous assoupir. C’est alors que quelque chose de froid et humide vient se coller contre votre joue. Lorsque vous ouvrez les yeux, c’est pour vous retrouver nez-à-truffe avec le chien. Manifestement, c’est l’heure de sa promenade.
Grommelant en vain, vous enfilez votre manteau, et essayez tant bien que mal d’attacher la laisse au collier de ce chien qui ne se sent plus de joie. La porte s’ouvre sur un courant d’air sibérien. Vous faites vos premiers pas dehors, et la magie commence.
La nuit n’est pas complète, elle brille d’un reflet argenté. Au-dessus de vous, une Lune pleine à 98% se détache nettement. Ce pourrait bien être la lune la plus brillante que vous ayez jamais vue. Vous n’en reverrez pas d’aussi haute avant 2023.
Pas très loin de cette splendide lune, la planète Mars brille d’un éclat de braise. En cette veillée de Noël, Mars est plus proche de la Terre qu’elle ne le sera avant 9 ans. Mars est également « à l’opposition ». C’est du jargon d’astronome pour dire « à l’opposé du Soleil ». Cela signifie que Mars est levée dès que le Soleil est couché. En cette veillée de Noël, la planète rouge sera donc visible toute la nuit.
Semblant glisser en formation dans le ciel, la Lune et Mars paraissent si proches que vous pourriez presque les atteindre et les lancer à Snoopy pour qu’il vous les rapporte.
Ou bien peut-être pourriez vous les attraper au lasso, comme le suggère George dans le film de Frank Capra « La vie est belle ». « Tu n’as qu’un mot à dire et je l’attrape au lasso. Hé ! C’est plutôt une bonne idée ! Je te décrocherai la Lune, Mary… »
D’ici quelques années, la NASA va de nouveau « attraper au lasso » la Lune. La fusée géante Ares, encore au stade de la planche à dessin, prendra forme pour ramener l’humanité sur ce brillant globe d’argent où les scientifiques apprendront à domestiquer les forces de la Lune.
Les plans visent à établir une base lunaire et à se servir de la surface lunaire comme d’un tremplin vers d’autres destinations plus lointaines encore. Au niveau des pôles lunaires, on a relevé des indices de présence d’hydrogène et peut-être d’eau glacée dans le sol. De plus, la plupart des roches lunaires sont constituées de minéraux qui contiennent plus de 40% d’oxygène. Cela en fait autant de matières premières qui peuvent être utilisées pour produire du carburant pour fusées, de l’air respirable ou de quoi se désaltérer sur ce monde sec et poussiéreux.
Un jour peut-être, à la veille d’un lointain Noël, un ou une d’entre nous sortira en scaphandre de sa douillette cabine lunaire pour aller promener son chien à longues enjambées. Cet être humain regardera le ciel et dira, le plus naturellement du monde « quel beau clair de Terre ce soir ! »
Mais ce soir, c’est sur le glacial sol terrien que résonne le bruit de vos pas sur le chemin du retour, profitant encore de ce moment d’éternité que vous offre la Lune et sa brillante compagne, Mars. Outre le bruit de vos pas, la scène n’est troublée que par celui de la médaille de Snoopy tintinnabulant contre le collier comme un grelot de traîneau. Soudain, une ombre passe furtivement devant la Lune. Un nuage ? Un avion ? Un traîneau ! Mince, ce n’était peut-être pas la médaille de Snoopy après tout !
Souriant aux anges, vous ouvrez la porte de chez vous en jetant un dernier regard à ce ciel nocturne dont vous ne verrez pas de plus bel exemple avant quelques années.
Merci le chien.
